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23 octobre 2021

Nouveaux contacts Rosa Newmarch - Leoš Janáček

 Les voyages de Janáček et la reconnaissance internationale

5. Nouveaux contacts Rosa Newmarch - Leoš Janáček


1. Ignorance internationale de Janáček

2. Qui est Rosa Newmarch ?

3. Rosa Newmark, premiers contacts avec la musique de Janáček

4. Rosa Newmark, premières rencontres avec Janáček (1922)

5. Nouveaux contacts Rosa Newmarch - Leoš Janáček (1923 - 1925) - cet article

6. Préparatifs du séjour londonien de Janáček

7. Le séjour londonien de Janáček, mai  1926

8 Retombées du séjour londonien (à venir)

9. Réflexions de Janáček sur deux concerts en 1926


Après la première britannique du Journal d’un disparu, accueilli plutôt modérément, Rosa Newmarch allait-elle se décourager, voire même baisser les bras devant tant de difficultés pour faire accepter la musique de ce vieux compositeur tchèque ? C’était bien mal connaître la détermination de cette femme, pourtant plus très jeune, elle aussi. Dès l’année suivante, elle retourna en Tchécoslovaquie, aussi bien à Prague qu’à Brno où elle rendit visite une nouvelle fois à Janáček, courant avril 1923. Auparavant, le compositeur lui recommanda de s’adresser, à Prague, à la pianiste Růžena Nebušková et au violoncelliste Julius Junek pour qu’ils lui interprètent Pohádka. Ces deux musiciens venaient de donner, dans sa version originelle, en février 1923, la première pragoise de cette quasi sonate pour violoncelle et piano, alors que le 7 mars de la même année, ils jouèrent à Brno la version définitive. Pour Rosa Newmarch, accompagnée de sa fille Elsie, ils jouèrent cette pièce en séance privée le 11 avril. La musicographe britannique eut les honneurs de cette œuvre dont la composition remontait à 1910 pour sa première version avant que Janáček ne la révise à plusieurs reprises pour en établir la version définitive peu de temps auparavant l’arrivée de Rosa Newmarch. Avec cette audition, elle complétait sa connaissance de la musique du compositeur morave par un ouvrage de musique de chambre. En plus des répétitions de pièces orchestrales de trois de ses élèves à l’Ecole d’orgue, František Hilma, Gustav Homola et Pavel Haas, Janáček signalait à l’honorable britannique l’interprétation de son chœur Sedmdesát tisíc (Les 70 000) par la chorale des instituteurs de Prague le 21 avril. Son invitée londonienne se trouvait-elle à Brno à ce moment-là et l’entendit-elle ? Peut-être.  


Après des semaines chargées et mouvementées à Prague, Rosa Newmarch souhaitait passer quelques jours tranquilles à Brno, mais sa fille relativisa ce souhait en écrivant « si en effet on pouvait parler de calme en compagnie de Janáček, car il était comme un coup de vent du nord-ouest. (1) » De sa rencontre avec Janáček, peu d’échos nous sont parvenus. Un peu plus tard, dans l’été 1923, Janáček sembla se plaindre dans un courrier à sa correspondante qu’elle semblait l’avoir oublié puisqu’il commençait sa missive par « Etes-vous si en colère contre Brno que vous ne vous en souvenez même pas avec un mot, même le moindre ? », mouvement d’humeur du compositeur ou simple manifestation d’humour pour lui démontrer que les Moraves pouvaient parfois s’exprimer comme les citoyens britanniques. Plus sérieusement, il lui annonçait que sa Sonate pour violon avait été sélectionnée pour le Festival de la Société internationale de musique contemporaine (du 2 au 7 août 1923) pour représenter la musique de chambre tchécoslovaque à Salzbourg où il se rendit. Il se félicitait du succès rencontré par son ouvrage (2) et il fit, dans la ville mozartienne, « connaissance, avec beaucoup de gens importants du monde musical. » Dommage qu’il ne citait pas leur nom. D’autres compositeurs virent leur patronyme s’afficher au programme des autres cinq concerts, Alban Berg, Bela Bartók, Florent Schmitt, Ernst Krenek, Serge Prokofiev, Maurice Ravel, Arthur Honegger, Manuel de Falla, Ferruccio Busoni, Darius Milhaud, Francis Poulenc, Charles Koechlin, Zoltan Kodaly, Paul Hindemith, etc. Parmi ceux qui furent présents à Salzbourg, lesquels Janáček rencontra-t-il ? Question sans réponse. Dans sa lettre, Janáček informait sa lectrice de la publication d’un de ses chœurs datant de plus de quinze ans, Kantor Halfar, (Halfar le maître d’école) ; IV/33 dans le catalogue dressé beaucoup plus tard par Nigel Simeone, John Tyrrell et Alena Němcová. Il l’avisait que « Je n’arrive pas à m’entendre avec Čapek » à propos de Věc Makropulos  (L’Affaire Makropoulos), l’opéra qu’il voulait entreprendre (3). Il rajouta pour signifier son état d’esprit présent «  Quand je n’ai aucune idée pour un nouvel ouvrage, je suis comme une coquille vide.  (4)»


L’activité épistolaire entre ces deux personnalités continua avec la réponse de la femme de lettres britannique. A sa lecture, le compositeur dut se réjouir et être rempli de gratitude envers sa correspondante. En effet, elle lui annonçait « J’ai quelques nouvelles qui, je l’espère, vous plairont. Votre suite orchestrale Šumařovo dítě [L’Enfant du violoneux - VI/14] sera donnée au concert symphonique le 3 mai 1924. J’ai fait exprès de la placer tard dans la saison dans l’espoir de son impression d’ici là (5). » De cette œuvre, une partition avait été éditée par le Club des Amis de l’art à Brno en 1914. Rosa Newmark, par ses discussions avec Janáček savait qu’une nouvelle édition se préparait chez Hudební matice avec d’ultimes modifications de la part du compositeur, mais lorsqu’elle lui écrivit en octobre 1923, l’édition n’était pas encore réalisée. Dans son courrier, Rosa Newmarch demandait à Janáček de l’aider à présenter cet ouvrage. D’autre part, comme elle n’était pas au courant que les négociations entre Čapek et Janáček avaient abouti à propos de L’Affaire Makopoulos, pour ne pas laisser sa « coquille vide », elle lui suggérait une comédie de Shakespeare pour sujet d’opéra ou un livret d’après H. G. Wells. Elle terminait en lui adressant ses souhaits de le voir en Angleterre au printemps prochain. Souhaits qui ne prendront corps qu’en 1926.


Comme pour Le Journal d’un disparu en 1922, L’Enfant du violoneux laissa les critiques musicaux dans l’expectative, voire dans l’incompréhension et le rejet. Son langage musical déconcertait par la juxtaposition de thèmes sans pont pour les relier, sans répétition à la tierce ou quarte supérieure ou inférieure, sans développement ou variations. Le chroniqueur du Times dans son édition du 4 mai 1924 rejetait clairement un tel style : « En supposant que (mi, sol, la, sol) en accents lourds sur basson et trombone soit le genre de thème qui est considéré comme beau en Tchécoslovaquie, on demande encore qu’il devrait avoir un certain développement, devrait commencer quelque part pour tendre les mains dans l’infini, devrait nous convaincre qu’il a le droit d’exister par son adaptabilité évidente à l’environnement. » Henry Wood, le chef d’orchestre renseigné par Rosa Newmarch sur les intentions du compositeur et sur son style de composition, ne faillit pas dans la conduite de son orchestre, mais cette musique, par trop différente de ce qui se faisait parmi les différents courants musicaux qui s’affirmaient durant cette période, perturbait les auditeurs. Cette première britannique de L’Enfant du violoneux, un coup pour rien ? Janáček devrait attendre des jours meilleurs.


Ainsi que Mme Newmarch le lui avait conseillé dans une lettre précédente, c’est en tchèque que le compositeur s’exprima dans son courrier de mars 1924, puisque sa partenaire comprenait assez bien cette langue. Rien d’étonnant à cela puisqu’elle parlait et écrivait convenablement en russe, langue slave cousine de la langue tchèque. Qu’annonçait donc le compositeur ? Il la prévenait de la production berlinoise de Jenůfa le 15 mars 1924 (6) à laquelle il était invité. Les répétitions auraient lieu les 12 et 13 mars. « Je ne sais pas si j’irai » écrivait-il en l’absence d’informations complémentaires. « Si j’y vais, ce sera le 11 mars par le train rapide qui quitte Prague à midi et arrive à Berlin à 22 heures. » Il ajoutait en lui demandant «Vous n’aimeriez pas y aller, vous aussi ? » Enfin, il précisait à cette femme de soixante-sept ans, à peine moins âgée que lui « Nous nous retrouverons à Brno très certainement, sinon ailleurs. Vous devez être en bonne santé pour faire un voyage aussi fatiguant dans notre pays.  (7) »  Il semble que Rosa Newmarch ne fit pas le voyage à Berlin et donc qu’elle n’assista pas au « succès [qui] a été écrasant. Le compositeur et tous les interprètes ont bénéficié d’innombrables rappels. » tel que l’écrivait une revue musicale. De plus, le chroniqueur soulignait « On a rarement connu un tel enthousiasme du public lors de la première d’une œuvre étrangère. (8) » Jenůfa avait été donné en Allemagne à deux reprises à Cologne et à Francfort, mais cette première berlinoise sous la direction d’Erich Kleiber donna le signal d’une diffusion dans un grand nombre de maisons d’opéra allemandes les années suivantes, dont des productions dans 9 villes différentes  de Aix-la-chapelle à Magdebourg assurant au compositeur une renommée dans le pays qui ne s’est jamais démentie. A son retour à Brno, Janáček s’adressa à Erich Kleiber dans ces termes « Je suis toujours auprès de vous dans mes pensées. Vous avez gratifié mon œuvre de quelques cimes, baignées d’une lueur solaire charmante. La chanson des recrues et celle de Jenufka, on me les jouait de façon rapide, comme des marches militaires ; vous leur avez insufflé l’essor des jeunes cœurs ardents. ‘Chaque couple doit traverser des tourments’  est devenu une sorte de chanson funèbre et à Prague et à Vienne ! Vous lui avez insufflé un sourire ! Et il doit en être ainsi ! » en saluant en Margarete Arndt-Ober « la meilleure Kostelnička qui ait jamais existé (9) » oubliant la prestation pragoise de Gabriela Horvátová de 1916 qui avait tant fait pour le succès de Jenůfa et la reconnaissance du compositeur en Bohème, prémices d’un prestige ailleurs qu’en Tchécoslovaquie… Le compositeur profita de son court séjour à Berlin pour rédiger un de ses feuilletons intitulé simplement Berlin  (XV/253) que le 15 mai 1924 le quotidien Lidové noviny publia en première page.


Lidové noviny du 15 mai 1924, feuilleton de Janáček "Berlin"
soulignés de rouge, les interprètes berlinois et le chef d’orchestre
le nom de 
Leoš Janáček, en haut à gauche est encadré de rouge.


Le premier avril, chez lui à Brno, il accueillit Rosa Newmarch accompagnée de sa fille Elsie. Parlèrent-ils de l’invitation d’aller à Londres l’année suivante ? Peut-être. Plus sûrement, le compositeur détailla à ses visiteuses le triomphe remporté par Jenůfa à Berlin tandis que la Londonienne l’entretint du festival Smetana à Prague qu’elle avait couvert pour le journal londonien Times. Approchait le jour au cours duquel le compositeur fêterait son soixante-dixième anniversaire. Avait-il eu vent de tout ce qui se préparait à Brno et à Hukvaldy ? Rosa Newmarch qui le suivait à trois ans près l’interrogea-t-elle sur le déroulement de ces festivités ? On peut le penser. Comme elle avait pris l’habitude de visiter la Tchécoslovaquie chaque année ou presque depuis sa première venue, elle lui annonça son voyage projeté pour l’année suivante pour assister au festival de la Société internationale de musique contemporaine qui se déroulerait à Prague au printemps (et à Venise en été). Depuis deux ans au moins, Janáček savait qu’il pouvait compter sur l’efficacité du soutien de cette personne, tout aussi décidée et volontaire que lui.


Les jours s’écoulèrent alors qu’après les célébrations de ses 70 ans, il mit fin à la partition de son sextuor pour vents, Mládí (Jeunesse). Au début de l’automne, un de ses derniers chœurs sur des paroles de Tagore, Potulný šílenec (Le Fou errant) vit sa première exécution par la Chorale des instituteurs moraves dirigée par le fidèle Ferdinand Vach. En novembre, une renarde vint gambader sur la scène de l’Opéra de Brno ; La Petite Renarde rusée, opéra insolite, y fut créé. Des exécutions de trois de ses œuvres embellirent la fin d’année de Janáček, d’abord la création à Prague en octobre de son premier quatuor à cordes, Sonate à Kreutzer, par le Quatuor Tchèque, ensuite la création américaine de Jenůfa à New-York, avec la participation de la soprano Maria Jeritza et à Brno la première des six Danses de Lachie, couronnant les nombreuses années qu’il passa à collecter la musique populaire morave, à l’étudier et la publier.


Aussi vigoureux que quarante ans plus tôt, dès le début de l’année 1925, Janáček entreprit la composition de son Concertino pour piano et six instruments (VII/11). En mai, il participa au festival de la Société internationale de la musique contemporaine au cours duquel fut programmé son nouvel opéra Příhody lišky Bystroušky (La Petite Renarde rusée). Quelle spectatrice croyez-vous qui suivit avec un immense intérêt les évolutions de cette renarde et ses échanges avec les humains ? Rosa Newmarch ! Venue à Prague pour suivre ce festival pour le compte du quotidien The Times, elle pensait bien rencontrer le compositeur une fois encore. Quelques jours avant son départ, elle lui expédia un courrier dans lequel elle lui annonçait son arrivée le 10 mai à Prague où elle avait réservé une chambre à l’hôtel Paříž. « J’espère vous voir à la répétition de votre opéra » espérait-elle. Cette femme de lettres, passionnée par la musique et particulièrement celle de Janáček qu’elle découvrait un peu plus chaque année avait étudié la partition de La Renarde, ce qui l’autorisait à écrire sur sa lettre « La pièce lyrique La Renarde rusée est très différente de n’importe quel opéra dans le monde  (10) ».  


Dès la fin du festival, l’envoyée du Times expédia son article sous le titre « Nouvel  opéra à Prague » où le lecteur comprenait tout de suite quel genre de musique avait triomphé dans la capitale tchécoslovaque. Après avoir cité les noms des trois chefs d’orchestre dirigeant le dernier des concerts et les titres de quelques œuvres symphoniques que le public du festival entendit à ce moment-là, elle précisa « Le programme contenait dans l’ensemble un pourcentage plus faible de musique purement expérimentale et il n’y eut pas de démonstrations hostiles de la part du public. » Mais les trois quarts du papier concernaient un animal sur scène «  La première production à Prague de l’opéra de Janáček La Petite Renarde rusée est cependant l’événement le plus discuté du moment ». Après cet unique visionnement et écoute de ce nouvel opéra, Rosa Newmarch délivra à ses lecteurs un certain nombre de sensations qu’elle avait ressenties manifestant une compréhension assez fine de cette pièce lyrique dont chacun trouvera ci-dessous des éléments. « La satire et la caricature sont tout à fait hors du cadre de l’œuvre. Ses animaux ne reflètent pas les vices et les vertus des êtres humains, mais jouent des rôles tout à fait distincts dans l’opéra. Janacek voit le monde animal sans la moindre sentimentalité maladroite dans un esprit fraternel. Le livret a suscité des critiques de la part de ceux qui ne le comprenaient pas et Janacek donne certainement à son auditoire la possibilité d’une perception rapide et imaginative [de son opéra]. La musique complète et prolonge la trame littéraire légère, remplissant ses espaces vides et éclairant ses obscurités. Janacek ne se répète jamais dans ses œuvres lyriques, mais la puissance et la fraîcheur de la musique de la petite renarde a une qualité supplémentaire pour laquelle on n’était guère préparé, la qualité d’un nouveau style dans les phases créatives tout au long de la vie du compositeur. La myriade de thèmes courts, le résultat d’une observation attentive de ‘la mélodie de la parole’ (11) et des voix de la nature, ils sont soudés dans un langage expressif complètement cohérent. L’orchestration est brillante et sûre, et les effets de couleurs infiniment variés. La musique est souvent joyeuse, comme dans le ballet amusant des poules, pathétique quand il suit les affaires d’amour malheureuses des humains ; pleine de mystère et de pressentiment en dépeignant la vie de la forêt, quand une occarina spécialement construite ajoute à la qualité surnaturelle des voix de la forêt ». 


Retenons deux phrases de son papier qui pourraient servir de conclusion provisoire : « En résumé, la musique répond en rythme et en sonorité à toutes les phases émotionnelles de l’opéra. La petite renarde rusée ajoutera de l’éclat à la réputation grandissante de Janacek.  (12)» Tel quel, cet article du Times donnait des clés pour entrer dans le monde du compositeur tchèque à condition que des interprètes britanniques acceptent de jouer quelques-unes de ses œuvres. Quant à ce que les spectateurs anglais puissent écouter et voir cet opéra sur une scène londonienne, de très nombreux lecteurs du journal n’eurent aucune chance d’appartenir au public qui étrenna cette éventualité. Ce fut seulement le 22 mars 1961 que la petite renarde déboula sur la scène du Sadler’sWells Opera dans une production dirigée par Colin Davis. Rosa Newmarch était décédée depuis une vingtaine d’années.


Auditeurs et spectateurs français étions-nous plus avantagés que ceux d’outre Manche ? A peine. Grâce à l’action du Théâtre des Nations et à la production berlinoise du Komische Oper dans la mise en scène de Walter Felsenstein qui fit halte à Paris en 1957, on avait pris quelques mois d’avance sur nos voisins anglais.


Et en 1925, en France, quels échos étaient parvenus de ce festival pragois ? De Henry Prunières qui en août 1925, s’exprima dans La Revue Musicale, j’extrais quelques éléments que le lecteur actuel pourra comparer avec ceux de Rosa Newmarch.


« Je dois dire tout d'abord l'impression d'étonnement que j'ai ressentie en découvrant cette musique absolument inconnue en France et dont la fraîcheur, la sincérité et l'accent de terroir vous frappent dès le premier contact. A Dieu ne plaise que je médise des excellents musiciens  qui composent aujourd'hui la jeune école Tchèque. Je les connais et les apprécie de longue date, mais il y a entre eux et un Janacek toute la différence qui sépare des artistes de grand talent d'un créateur de génie. Ce vieillard m'a paru infiniment plus jeune que les adolescents dont on venait de me montrer les œuvres… […] Ce qui est prodigieux, dans cette partition, c'est l'invention mélodique, c'est l'ingénuité de l'inspiration. L'orchestre sonne bien, l'écriture harmonique est fort habile (malgré l'abus des quintes augmentées). Le chant consiste en une déclamation très mélodique et modelée sur la sonorité même des mots. On pense tout le temps à une sorte de Moussorgsky tchèque. C'est la même force persuasive, la même spontanéité, la même fraîcheur d'inspiration. Je ne crois pas que Renard soit le meilleur opéra de Janacek, mais c'est assurément une des œuvres lyriques modernes les plus intéressantes et les plus vivantes que j'ai entendues depuis vingt ans. Quand se décidera-t-on à révéler en France les œuvres du dramaturge tchèque ? »


Toujours en 1925, Rosa Newmarch en avait-elle terminé avec son support de la musique de  Janáček dans le pays britannique ? Non. L’année 1926 verra même une amplification du dévouement de l’ énergique londonienne…


Joseph Colomb - octobre 2021


Sources : 


Zdenka E. Fischmann, Janáček - Newmarch correspondence, 1986.


Nigel Simeone, The Janáček Compendium, The Boydell Press, 2019. 


Nigel Simeone, John Tyrrell, Alena Němcová, Janáček’s works, A catalogue of the music and writings of Leoš Janáček, 1997.


John Tyrrell, Years of a life, volume 2, Tsar of forests, Faber and Faber, 2007


Notes : 


1. Zdenka E. Fischmann, Janáček - Newmarch correspondence, page 72.


2. La Sonate pour violon et piano fut jouée au cours du quatrième concert du festival, le 5 août, avec des pièces d’Arthur Bliss, Albert Roussel, Emerson Whithorne, Lord Berner et Igor Stravinsky.


3. Finalement, le 10 septembre 1923, Čapek tomba d’accord avec Janáček qui débuta la composition de l’opéra Věc Makropulos dans les semaines qui suivirent.


4. Lettre de Janáček à Rosa Newmarch du 13 août 1923.


5. Lettre de Rosa Newmarch à Janáček du 4 octobre 1923.


6. En fait la création berlinoise eut lieu le 17 mars 1924.


7. Lettre de Janáček à Rosa Newmarch du 5 mars 1924.


8. Oskar Bie, musicographe allemand s’exprima ainsi dans le numéro d’avril 1924 de la revue viennoise Musikblätter des Anbruch.


9. Lettre de Janáček à Erich Kleiber du 22 mars 1924 dans la traduction plus que fidèle de Daniela Langer, page 401 de son livre Leoš Janáček, Ecrits, choisis, traduits et présentés par Daniela Langer, 2009.


10. Lettre de Rosa Newmarch à Janáček du 26 avril 1925.


11. "Toute parole est musique", pourrait-on résumer dans une formule trop simple pour englober l’ensemble des éléments constitutifs de cette notion, les nápěvsky mluvy, comme les entendait Janáček.


12. The Times, Londres, mai 1925.


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